Françoise Boudreault
Depuis sa première à Bogota en mai 2022, la spectacle Muse a été vu au Fringe d’Édimbourg en Écosse et au Festival International de cirque de St.John à Terreneuve, entre autres. À la TOHU, jusqu’au 13 novembre, cette création rodée sera présentée au Diamant de Québec pendant la période des fêtes et ensuite dans plusieurs villes de la province avant de tourner aux États-Unis.
Le trampo-mur fait partie de la signature de FLIP Fabrique et la compagnie utilise dans Muse une structure intéressante sans surfaces opaques comme les murs habituels. Les parois transparentes rendent visibles ce qui entoure la structure, sans faire disparaître momentanément les acrobates, augmentant aussi la présence des couleurs qui teintent le cyclo aux teintes vives en toile de fond, propice aux silhouettes et contre-jours. Muse est un spectacle photogénique avec des éclairages changeants et colorés, comme autant de variantes possibles dans la diversité des genres.
La scénographie minimaliste de Vanessa Cadrin donne toute la place aux excellent·e·s acrobates de Muse qui, avec leurs costumes beiges en début de spectacle nous apparaissent tous de la même chair, mais pas anonymes pour autant. La chorégraphie complexe du duo de trapèze « à deux étages » est très réussie, interprétée avec brio par Anne-Marie Godin et Évelyne Paquin-Lanthier. En aérien, deux solos au trapèze-danse sont remarquablement performés par Hugo Duquette dont voit la transformation progressive en drag. Soulignons les prestations de Jérémie Arsenault, virtuose du diabolo, qui comme la plupart de ses collègues, contribue à plusieurs numéros. L’utilisation des cordes à danser, déclinées en solo ou en groupe, montre que le cirque a la capacité d’intégrer des éléments simples pour en multiplier les facettes. Très bon soutien pour les interprètes, la musique techno de Milimetrik, à très haut volume par moments, est entraînante et donne souvent le goût de danser, comme dans le numéro de trampo-mur où se distinguent Frédérique Hamel et Thomas Chamber.
Spectacle où abondent crinolines, tutus, talons hauts et paillettes, Muse explore le thème des codes de genre liés aux stéréotypes féminins et masculins. Grâce à la consultante en études féministes Chantal Dupuis, Flip Fabrique a ponctué sa dixième création de citations de personnalités connues s’exprimant sur des enjeux liés à la situation des femmes. Une partie du texte de l’emblématique chanson d’Anne Sylvestre, Une sorcière comme les autres, apporte une dose de poésie apaisante. Dans les sociétés plus éveillées à la diversité des genres, le spectacle sera sans doute perçu comme jouant sur les clichés tandis que pour des publics plus conservateurs, il devrait être plus percutant et apporter une bouffée d’air frais à tous ceux et celles qui militent pour affirmer leur différence, la parité, l’équité et l’inclusion.
Une fois n’est pas coutume : FLIP Fabrique a publié sur les réseaux sociaux un joli album de photos signées Benoit Z. Leroux.